14 mai 2024
Administrateur à l’Affiche – Rita Parikh
Administrateur à l’affiche est une rubrique régulière qui donne l’occasion à une administratrice ou à un administrateur de premier plan de discuter de réflexions pratiques et de développements importants en matière de gouvernance climatique pour les conseils d’administration. Chapter Zero Canada a récemment discuté avec la présidente du conseil de Vancity, Mme Rita Parikh. Nous avons demandé à Mme Parikh de nous parler de justice climatique, de l’engagement de Vancity d’atteindre la carboneutralité d’ici 2040 et de la promesse continue de l’organisation de soutenir les communautés les plus touchées par les changements climatiques. Voici ses réponses :
Quel est le rôle de la justice climatique dans la lutte contre les disparités? Comment pouvons-nous créer des politiques environnementales durables, coopératives et équitables pour tous?
Ce sont de grandes questions! Voici ma façon de voir les choses : Je crois que la justice climatique s’appuie sur la reconnaissance du fait que les changements climatiques sont vécus le plus durement, et continueront de l’être, par les gens qui en sont les moins responsables et les moins en mesure d’atténuer leurs impacts. C’est assurément ce que j’ai constaté dans mon travail avec des agriculteurs du Bangladesh et avec des migrants et des réfugiés de pays d’Asie et d’Afrique dont les vies ont été dévastées par la sécheresse, les inondations et la famine. La justice climatique sous-tend un mouvement mondial dynamique qui se rend aussi loin que les communautés nordiques du Canada. Il se compose de toutes sortes de gens, des scientifiques comme des agriculteurs, des banquiers comme des pêcheurs, qui savent, puisque nous y assistons déjà évidemment, que les gens pauvres, les personnes vulnérables, les femmes, les citoyens des pays du Sud, les Autochtones – ceux qui ont été systématiquement et historiquement diminués et appauvris par des pratiques économiques extractives coloniales –, seront laissés derrière et rendus encore plus vulnérables dans notre transition vers une économie plus durable.
J’aime l’idée de la justice climatique comme un mouvement, car cela reconnaît aussi que ces populations vulnérables, celles qui sont généralement exclues des décisions politiques et économiques qui ont mené à la dévastation de leurs moyens de subsistance et de leur communauté, sont des agents de changement dynamiques, informés et acharnés. Ce sont les personnes qui mènent véritablement ce mouvement.
Cette reconnaissance signifie donc que sur le plan des politiques, nous, qui sommes en position de privilège et de pouvoir, devons prendre part à un autre type de conversation, une discussion qui s’articule autour des voix de ceux qui vivent en marge. C’est notre seule manière de comprendre véritablement la façon dont les changements climatiques sont vécus et le meilleur moyen de nous y attaquer. Et c’est la seule manière efficace d’aller au-delà de la protection des personnes vulnérables pour veiller à ce qu’elles guident les stratégies de transition et en profitent.
Pouvez-vous nous en dire davantage sur l’engagement de Vancity à atteindre la carboneutralité d’ici 2040? Quelles mesures prenez-vous pour y arriver?
L’ambition de Vancity est d’atteindre zéro émission nette d’ici 2040 pour tous ses prêts et prêts hypothécaires. Cela signifie que nous visons à éliminer, ou du moins à réduire considérablement, les émissions de gaz à effet de serre des actifs que nous finançons, comme les bâtiments et les entreprises, et que toutes les autres émissions seront réduites à zéro.
Pour atteindre cet objectif, nous calculons les émissions des actifs faisant l’objet de nos prêts, que ce soit des entreprises, des immeubles commerciaux ou des maisons. L’expertise et la science évoluent, et nous apprenons au fur et à mesure. Nous travaillons aussi avec nos membres pour réduire ces émissions. Finalement, nous savons que nous ne fonctionnons pas en vase clos et que l’atteinte de nos objectifs entraînera des changements de politiques plus vastes menés par des gouvernements, des organismes sans but lucratif et des groupes communautaires. Donc, nous travaillons également avec ces acteurs et nous défendons des changements de politiques pouvant mener à une réduction des émissions.
Considérant le volume de ses prêts hypothécaires, Vancity se concentre beaucoup sur les immeubles et les émissions qui y sont associées. Avec notre climat changeant, l’environnement bâti doit à la fois émettre moins d’émissions et offrir des lieux sûrs en cas d’événements climatiques extrêmes comme les canicules. Nos conseils énergétiques résidentiels (en anglais) gratuits pour les membres de Vancity et notre gamme de produits de prêts Planet-Wise, qui soutiennent nos membres dans la réduction des émissions de leurs foyers, de leurs entreprises et de leurs moyens de transport, sont donc des exemples de notre façon d’aider nos membres à réduire leurs émissions.
Comment Vancity soutient-elle les communautés touchées par les changements climatiques? Pouvez-vous nous donner des exemples précis de solutions d’inclusion financière et sociale que vous fournissez pour faciliter la transition vers un mode de vie plus sain et durable?
La vitesse et l’ampleur des changements climatiques pèsent déjà sur l’infrastructure, la santé, le bien-être, les traditions culturelles et les pratiques des communautés. Ces impacts diffèrent d’une communauté à l’autre et nous savons que les risques climatiques aggravent les inégalités sociales existantes. C’est pourquoi le conseil et le personnel de Vancity ont insisté sur une approche de notre travail axée sur la justice climatique.
Par l’entremise de notre financement Shared Success, nous contribuons à un accès continu au logement abordable sécuritaire sur le plan climatique. Notre programme de rénovation résidentielle à but non lucratif fournit des subventions à des fournisseurs de logement à but non lucratif et à des coopératives d’habitation pour mettre en chantier des rénovations énergétiques en profondeur qui veillent au confort et à la santé des occupants, et nous soutenons des rénovations respectueuses du climat de logements dans les réserves. Au-delà de ces mesures, nous explorons comment financer de façon optimale les initiatives énergétiques vertes appartenant à des groupes en quête d’équité ou menées par ceux-ci.
Comment les progrès de Vancity dans l’amélioration du bien-être des gens, des communautés et de l’environnement sont-ils mesurés et communiqués?
Je dois commencer en précisant que Vancity prend la mesure et la communication de ses émissions très au sérieux. Je veux aussi souligner que nous apprenons; nous nous attendons à ce que notre approche évolue à mesure que l’expertise et le consensus entourant les pratiques exemplaires en matière de mesure s’approfondissent. À l’heure actuelle, Vancity mesure son incidence positive de différentes manières. Nous appliquons par exemple les normes mondiales de comptabilité et de présentation de l’information sur les GES du Partnership for Carbon Accounting Financials pour mesurer l’ampleur des émissions de nos prêts et en faire état. Dans le cadre de notre accent sur la réconciliation, nous tentons d’obtenir une certification Relations progressistes avec les Autochtones, qui nous aidera à évaluer notre rendement et nos domaines à améliorer. Comme Vancity est aussi membre de la Global Alliance for Banking on Values (GABV), elle mesure le triple résultat de ses actifs et actifs administrés (TBLAA). La GABV définit les TBLAA comme des actifs qui contribuent à au moins une des dimensions du bien-être socioculturel, économique ou environnemental. Plus de 30 pour cent des actifs totaux de Vancity, y compris ceux que nous administrons, se trouvent dans cette catégorie.
Vancity est signataire du cadre de travail Principles for Responsible Banking (PRB). Par son entremise, les banques prennent des mesures pour veiller à ce que leur stratégie de base, leur prise de décisions, leurs prêts et leurs investissements respectent les Objectifs de développement durable des Nations Unies et les accords internationaux comme l’Accord de Paris sur le climat. En tant que signataires, nous nous sommes engagés à produire une auto-évaluation annuelle pour laquelle nous tentons d’obtenir un niveau modéré d’assurance et qui fait état de nos progrès dans la mise en œuvre des six principes des PRB, y compris nos progrès sur la réduction des émissions et l’atteinte des objectifs de santé financière que nous nous sommes fixés. Nous communiquons aussi nos progrès dans notre rapport annuel et notre rapport climatique. Au début du mois de mai, nous publierons notre deuxième rapport climatique contenant plus de détails sur nos initiatives à ce jour et sur nos autres manières de profiter d’occasions climatiques et de gérer le risque en la matière.
Biographie :
Mme Rita Parikh est la présidente du conseil de la coopérative de crédit Vancity et une administratrice de la banque d’investissement communautaire Vancity. Elle apporte à ses fonctions des décennies d’engagement auprès des femmes, des migrants, des groupes communautaires, des peuples autochtones et des mouvements sociaux en Asie, dans le Pacifique Sud et au Canada. Dans le cadre de ce travail, elle a été témoin des effets dévastateurs des changements climatiques sur les communautés, les moyens de subsistance et les cultures. Elle a aussi eu le privilège d’observer et de soutenir des stratégies de changement.
Mme Parikh a été administratrice ou présidente du conseil de coopératives d’envergure comme Mountain Equipment Coop et de nombreux organismes à but non lucratif nationaux et locaux comme Oxfam Canada, la Victoria Immigrant and Refugee Centre Society et la Victoria International Development Education Association. Elle est également une cadre supérieure chevronnée de la communauté des organismes à but non lucratif, ayant travaillé comme directrice générale de l’association Pacific Peoples Partnership et du réseau Canadian Parents for French (C.-B.). Mme Parikh est une leader reconnue du secteur de la réglementation des soins de santé au Canada, et elle a été directrice générale de l’organisme Nursing Community Assessment Service (au sein du plus important organisme réglementaire des soins de santé en C.-B., le BC College of Nurses and Midwives), où elle a travaillé huit ans à accélérer et à faciliter l’entrée du personnel infirmier formé à l’étranger dans la main-d’œuvre canadienne. Elle est aussi cofondatrice de l’organisme Pacific Refugee Welcome Group de Victoria, qui a parrainé et soutenu la réinstallation de réfugiés de la Syrie et de l’Érythrée.
Mme Parikh possède une maîtrise ès arts en affaires internationales de la Norman Paterson School of International Affairs d’Ottawa, et un baccalauréat en journalisme de l’Université Carleton. Elle est mère de deux jeunes adultes qui aiment et apprécient le plein air. Mme Parikh est une invitée reconnaissante sur le territoire non cédé des peuples de langue lekwungen, et elle reconnaît son obligation de continuer à travailler en partenariat avec les peuples des Premières Nations pour cerner et démanteler l’héritage du colonialisme.