24 juin 2014

Avis 25-201 des AVCM relatif aux indications à l’intention des agencies de conseil en vote

Cette lettre est soumise au nom de l’Institut des administrateurs de sociétés (« IAS ») en réponse à l’invitation à commenter le Projet d’avis 25-201 des ACVM relatif aux indications à l’intention des agences de conseil en vote.
 
Cette lettre reflète les points de vue de nos sections régionales à travers le pays et a été approuvée par le Conseil national de l’IAS.
                                               
Sommaire de la position de l’IAS
 
Même si l’IAS est d’avis que les indications fournies par les ACVM ciblent les enjeux appropriés, notre lettre s’attache principalement à trois recommandations dans des secteurs où nous pensons que ces seules indications ne suffisent pas à répondre aux préoccupations de plusieurs participants au marché financier concernant les agences de conseil en vote. D’abord, une firme de conseil en vote devrait être privée du droit d’émettre une recommandation de vote sur un sujet particulier lorsque cette agence a fourni des services de consultation à l’émetteur ou au client investisseur de l’agence ou lorsque le propriétaire y a un intérêt matériel. Deuxièmement, l’industrie devrait être engagée à fournir un niveau minimal de formation aux analystes et être requise de divulguer la nature de cette formation. Enfin, les agences de conseil en vote devraient être requises de débattre de recommandations contraires avec l’émetteur avant que le rapport soit complété et laisser à l’émetteur suffisamment de temps pour inclure une réponse dans les documents fournis aux clients de l’agence de conseil en vote.
 
L’IAS est d’avis qu’on devrait accorder à l’industrie du conseil en vote une année pour adopter ces recommandations. Le défaut de ce faire devrait entraîner une intervention réglementaire des ACVM.
 
Contexte
 
En août 2012, l’IAS a soumis une lettre de commentaires aux ACVM en réponse au Projet d’avis 25-401[1]. Dans cette lettre, nous faisions une série de recommandations qui, croyons-nous, contribueraient à répondre à l’actuelle disproportion entre l’influence des agences de conseil en vote et un élément essentiel de la gouvernance de sociétés, à savoir l’exercice de leur droit de vote par les actionnaires en se fondant sur des renseignements exacts et appropriés. Nous continuons de croire que l’approche pragmatique décrite dans notre lettre précédente serait de nature à atténuer certaines tensions qui ont présentement cours dans nos marchés financiers à l’égard du rôle et des responsabilités des agences de conseil en vote.
 
Selon nous, le Projet d’avis 25-201 des ACVM cible les réelles préoccupations concernant les agences de conseil en vote et l’IAS souhaite voir l’industrie du conseil en vote adhérer aux indications fournies par les ACVM. Toutefois, dans trois domaines spécifiques, nous croyons que ces indications sont insuffisantes.
 
Conflits
 
L’IAS est d’avis que les indications fournies par les ACVM et les procédures internes décrites par les agences de conseil en vote seront adéquates pour répondre à de nombreuses situations de conflits d’intérêts potentiels. En fait, l’une des attentes imposées par les ACVM – la divulgation aux clients de tout conflit d’intérêts réel ou potentiel – avait aussi été proposée par l’IAS dans sa lettre précédente.
 
Nous croyons cependant que dans les cas où l’agence de conseil en vote a fourni des services de consultation à un émetteur sujet à une recommandation de vote, la divulgation est insuffisante. Comme il l’a fait dans sa lettre concernant le Document 25-401 des ACVM, l’IAS recommande que les agences de conseil en vote soient privées du droit d’émettre une recommandation de vote sur un sujet particulier lorsqu’elles ont fourni des services de consultation à l’émetteur ou lorsque le client investisseur ou le propriétaire y a un intérêt matériel.
 
Normes de formation et d’expérience
 

La qualité de l’analyse à l’origine des recommandations de vote représente une importante source de tensions entre les émetteurs et les agences de conseil en vote. Des préoccupations ont été soulevées concernant l’inexpérience du personnel d’agences de conseil en vote à qui on demande d’analyser des questions complexes. Compte tenu du volume très élevé de recommandations de vote préparées chaque saison par les agences de conseil en vote, le risque d’erreur est grand. L’impact d’une erreur peut l’être encore plus. En fait, nous sommes au courant de plusieurs situations où des recommandations de vote de la part d’agences de conseil en vote contenaient des erreurs et des inexactitudes.
 
Compte tenu de l’influence des recommandations des agences de conseil en vote, il est important que les participants au marché financier sentent que ces firmes embauchent des gens qualifiés dotés des compétences requises pour réaliser des analyses compliquées. L’IAS croit que l’industrie du conseil en vote devrait s’engager à offrir un niveau minimal de formation aux analystes dont les travaux façonnent les recommandations de vote. En outre, les agences de conseil en vote devraient être requises de divulguer la nature de cette formation.
 
Nous recommandons par ailleurs que les agences de conseil en vote réexaminent leur pratique d’émettre des recommandations de vote sur des transactions complexes de fusion et acquisition. Ces transactions exigent un important degré de formation et d’expérience pour qu’elles puissent être analysées de façon appropriée et nous croyons que les tensions évoquées plus haut pourraient être réduites si les agences de conseil en vote se retiraient de ce domaine ou, à tout le moins, investissaient les ressources nécessaires pour faire en sorte que des gens compétents mènent ce type d’analyse.
 
Dialogue avec l’émetteur
 
À l’heure actuelle, les occasions d’engagement entre émetteur et agence de conseil en vote sont considérablement limitées. Les agences de conseil en vote invoquent la nécessité de demeurer indépendantes et le risque de subir des influences pour ne pas s’engager auprès des émetteurs durant la saison des votes par procuration. Cela est illogique : si une agence de conseil en vote est véritablement indépendante, elle devrait être en mesure de mener sa diligence raisonnable, de poser les bonnes questions aux émetteurs et de s’engager dans un dialogue afin d’assurer l’exactitude de ses informations. De plus, l’argument selon lequel un engagement accru de l’émetteur serait trop coûteux pour les agences de conseil en vote n’est pas convaincant. Selon nous, une analyse exacte est une chose pour laquelle les clients sont disposés à payer.
 
Nous n’en reconnaissons pas moins qu’il serait très difficile de s’engager auprès des émetteurs sur chaque recommandation de vote, compte tenu du nombre très élevé de rapports régulièrement produits par les agences de conseil en vote. Dans notre réponse au Document 25-401 des ACVM, nous préconisions une approche pragmatique.

  1. Lorsque l'agence de conseil en vote entend formuler une recommandation contraire, elle doit en discuter avec l'émetteur et en partager le rapport avec ce dernier avant que la recommandation ne soit conclue; et
  2. Si le résultat de ce processus demeure une recommandation contraire voulue, l'émetteur doit disposer d'assez de temps[2] et de la possibilité, s'il le désire, d'inclure une remarque dans les documents qui sont fournis aux clients de l'agence de conseil en vote.
Nous sommes sensibles à l’argument des ACVM invoqué dans son Projet d’avis 25-201 selon lequel, en dépit de recommandations contraires de la part d’une agence de conseil en vote, les émetteurs peuvent s’engager directement auprès des actionnaires. Cependant, même s’il est corrigé plus tard, le tort causé par un rapport contraire – en particulier s’il est fondé sur une analyse inexacte – est fait aussitôt que le rapport est émis. Nous croyons que la meilleure conduite à suivre consiste à minimiser à la source le risque d’erreur. Cela peut être réalisé par un engagement accru dans les cas de recommandations contraires. Nous sommes d’avis qu’une agence de conseil en vote et un émetteur peuvent avoir des opinions divergentes sur une recommandation de vote, mais ne devraient pas avoir à diverger d’opinion sur les faits.
 
Autre
 
Nos recommandations représentent un effort afin d’établir un accommodement entre les agences de conseil en vote et les émetteurs et de répondre aux tensions entre les deux parties. Il est important de souligner, toutefois, que sans égard à des changements ou améliorations aux pratiques des agences de conseil en vote, ces recommandations ne devraient pas être envisagées comme des solutions de remplacement à la nécessité que les investisseurs prennent leurs propres décisions, effectuent leur propre diligence raisonnable et fassent voter leurs mandataires
 
Il est aussi important de souligner que les agences de conseil en vote font partie d’un système plus vaste de vote par procuration, lequel est aussi sous analyse. Nous encourageons les autorités réglementaires à poursuivre leur évaluation de l’intégrité de l’infrastructure de vote par procuration telle que décrite dans le Document de consultation des ACVM 54-401 et à faire en sorte que les indications aux agences de conseil en vote s’alignent avec les objectifs décrits dans ce processus concomitant.
 
Demande de commentaires
 
À l’égard des questions spécifiques contenues dans le Projet d’avis, nous croyons y avoir répondu directement ou indirectement dans notre présente lettre.
 
Conclusion
 
L’industrie du conseil en vote a acquis une maturité telle que ce secteur est désormais partie intégrante de nos marchés financiers. Considérant l’impact que ses recommandations peuvent avoir sur la situation financière et la gouvernance des sociétés inscrites en bourse et, bien sûr, sur nos marchés financiers, l’IAS est d’avis qu’il existe d’importantes possibilités d’accroître la transparence et l’exactitude de ses pratiques au profit de l’ensemble des participants au marché. L’approche pragmatique que nous proposons plus haut contribuera à y parvenir.
 
Selon nous, les ACVM devraient accorder à l’industrie du conseil en vote un délai d’un an pour adopter l’approche précisée dans cette lettre. Si, à l’expiration de ce délai, l’industrie n’a pas adopté ces recommandations de façon adéquate, les ACVM devraient intervenir en édictant une réglementation formelle. Nous recommandons également que les ACVM adoptent un mécanisme électronique pour la réception de commentaires et de préoccupations de la part de participants au marché afin de documenter les pratiques de vote par procuration et les expériences vécues par les participants au marché.
 
L’IAS salue les ACVM pour la qualité de leur document et est heureux d’avoir eu l’occasion de leur transmettre ses commentaires.

1] https://www.osc.gov.on.ca/documents/en/Securities-Category2-Comments/com_20120820_25-401_magidsons.pdf
[2] La pratique actuelle de 24 heures est insuffisante.

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