11 mars 2014
Consultation sur la Loi Canadienne sur les sociétes par actions (LCSA)
Objet : Demande de commentaires – Consultation sur la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA)
Cette lettre est soumise au nom de l’Institut des administrateurs de sociétés (IAS) en réponse à l’invitation à commenter le Document « Consultation sur la Loi canadienne sur les sociétés par actions », publié par Industrie Canada le 11 décembre 2013.
L’IAS est une association à but non lucratif comptant plus de 8 000 membres et un réseau de onze sections régionales dans l’ensemble du Canada. Notre vision consiste à être la principale organisation au Canada à représenter les administrateurs et administratrices dans les secteurs à but lucratif, à but non lucratif et dans les sociétés d’État. Notre mission consiste à stimuler l’excellence chez les administrateurs afin de renforcer la gouvernance et la performance des sociétés et organisations canadiennes. Cette mission est réalisée au moyen de la formation, de la reconnaissance professionnelle et de la promotion des meilleures pratiques de gouvernance.
Dans le cadre de l’élaboration de cette missive, l’IAS a réuni un Groupe de travail composé d’éminents administrateurs et experts de la gouvernance de sociétés provenant de l’ensemble du Canada. Ce Groupe de travail était composé de :
M. Ian Bourne – Calgary – Administrateur de sociétés
M. Peter Dey – Toronto – Administrateur de sociétés
M. Thierry Dorval – Montréal – Associé, Norton Rose Fulbright Canada, LLP
Mme Maryse St-Laurent – Calgary – Vice-présidente et secrétaire d’entreprise, TransAlta Corporation
Le soussigné était président du Groupe de travail.
Cette lettre reflète les points de vue du Groupe de travail et l’apport de nos sections régionales de partout au pays et a été approuvée par le Conseil d’administration national de l’IAS.
L’IAS appuie fortement la position du gouvernement fédéral selon laquelle le Canada doit maintenir un solide cadre de gouvernance de sociétés qui reflète et facilite à la fois les meilleures pratiques au sein des sociétés canadiennes. Avant de commenter les enjeux spécifiques énoncés dans le Document de consultation, nous aimerions d’abord exprimer trois commentaires d’ordre général.
- L’IAS est d’avis que, dans la plupart des cas, c’est par l’identification des meilleures pratiques et leur développement au sein du marché – plutôt que par l’imposition de statuts et règlements normatifs – que la gouvernance de sociétés au Canada a le plus de chances de progresser. Les statuts et règlements normatifs peuvent être rigides, entraîner des conséquences non désirées, se révéler indifférents à la diversité des entreprises qui y seront assujetties et s’avérer contraires à la notion fondamentale d’imputabilité des administrateurs, laquelle est renforcée par des élections annuelles.
- Même si la LCSA fournit déjà un cadre de fonctionnement efficace aux sociétés constituées en vertu des lois fédérales, les entreprises canadiennes sont aussi soumises à toute une variété de règles, règlements et jurisprudences qui façonnent leurs opérations. Cela comprend les règles édictées par les gouvernements provinciaux, les autorités réglementaires provinciales des valeurs mobilières, les bourses et les tribunaux. L’IAS est d’avis que chacune de ces instances joue un rôle important et distinct dans l’environnement canadien de la gouvernance et qu’à titre de ligne directrice, aucun changement à la LCSA ne devrait faire obstacle aux mandats ou aux décisions de ces organismes ou accroître le fardeau réglementaire de ces entreprises en y superposant des exigences qui en chevaucheraient d’autres. Nous soumettrons plus loin dans ce texte les cas où il nous paraîtrait plus approprié qu’une autre autorité soit chargée de l’établissement de règles.
- Un certain nombre de propositions du Document de consultation s’appliquent davantage aux sociétés cotées en bourse qu’aux entreprises fermées. Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (« ACVM ») et la Bourse de Toronto (« TSX ») ont déjà des règles qui couvrent de telles propositions. Ces règles peuvent également être modifiées plus promptement que par une réforme de la LCSA afin de répondre aux conditions et aux besoins du marché. Nous souscrivons à l’affirmation contenue dans le Document de consultation selon laquelle « en tant que loi-cadre, la LCSA établit la structure et les normes de base en ce qui a trait à la direction et au contrôle d’une société, mais elle ne prescrit pas comment gérer une société. » Des modifications à la LCSA qui chercheraient à dicter les opérations d’une société seraient contraires aux intentions et aux objectifs de la législation.
Selon nous, le besoin de flexibilité, celui d’éviter les chevauchements et les incohérences ainsi que la facilité de procéder à des amendements font en sorte qu’une révision législative de la LCSA ne devrait être effectuée qu’avec la plus grande prudence, si elle doit clairement améliorer et ajouter de la valeur à long terme à la gouvernance de sociétés et à la compétitivité des entreprises canadiennes. Voici maintenant nos commentaires sur les questions soulevées dans le Document de consultation.
Rémunération des cadres
La question de la rémunération des cadres a continué de susciter un intérêt considérable de la part des organismes de réglementation provinciaux, des investisseurs et du public. Les intervenants et d’autres sont invités à faire des commentaires à savoir si les dispositions de la LCSA reflètent les pratiques exemplaires des sociétés et les intérêts des actionnaires dans ce domaine.
L’IAS croit fermement qu’il est de la responsabilité du conseil d’administration d’approuver la stratégie, les politiques et les pratiques de rémunération de l’entreprise – laquelle responsabilité doit être exercée en conformité avec les devoirs fiduciaires du conseil d’agir dans les meilleurs intérêts de la compagnie. Nous n’appuyons pas des pratiques qui, dans les faits, minent ou réduisent la responsabilité des administrateurs en matière de rémunération.
La rémunération des cadres exige une compréhension approfondie de la stratégie à long terme de l’entreprise et de sa performance ainsi que des rôles et responsabilités de ses cadres supérieurs. L’accès à des renseignements confidentiels et sensibles au plan compétitif est également essentiel à l’établissement de justes niveaux de rémunération. Ce sont là des questions que le conseil est le mieux placé pour évaluer.
Il est aussi important de prendre note qu’historiquement, les niveaux de rémunération au Canada ont été considérablement plus bas qu’aux États-Unis ou au Royaume-Uni, des pays où le vote sur la rémunération (« say on pay ») a été instauré comme réponse politique aux préoccupations du public à l’égard de salaires injustifiés versés à des cadres. Les grandes entreprises canadiennes ont aussi un historique de consultation auprès de leurs actionnaires institutionnels sur les questions de gouvernance et, lorsqu’ils le jugent nécessaire, au moyen du mécanisme de proposition des actionnaires prévu dans la LCSA, les actionnaires peuvent soumettre des propositions sur des questions relatives à la rémunération.
La volonté des conseils d’administration d’entreprises canadiennes de répondre aux préoccupations des actionnaires peut témoigner d’une différence culturelle propre au Canada et de différences dans ces pratiques de gouvernance par rapport à celles qui ont cours aux États-Unis ou au Royaume-Uni. Par exemple, les entreprises canadiennes tendent à avoir moins d’administrateurs issus de la direction que le Royaume-Uni et, contrairement à ce qui est le cas aux États-Unis, le chef de la direction est rarement président du conseil d’administration. Selon nous, il n’existe aucune nécessité d’adopter le vote obligatoire sur la rémunération comme une mesure incitative pour favoriser un meilleur dialogue avec les actionnaires.
Même si les conseils de diverses entreprises pourraient décider d’adopter de façon volontaire le vote sur la rémunération, nous ne croyons pas que le fait que d’autres pays ont adopté le vote obligatoire sur la rémunération comme forme de réaction politique soit une raison valable pour que le Canada adhère à cette pratique. En décidant de ne pas adopter l’attestation du vérificateur du contrôle interne à l’égard de l’information financière (codifiée aux États-Unis dans l’article 404 de la SarbanesOxley Act of 2002), le Canada a reconnu qu’il ne s’agissait peut-être pas d’une réglementation adéquate et a choisi une approche différente. Celle-ci a été bien accueillie par la plupart des participants au marché. Nous croyons que le vote obligatoire sur la rémunération est un autre cas où le Canada devrait se distinguer.
Pour dire les choses simplement, il n’est pas clair à nos yeux que le vote obligatoire sur la rémunération réglerait quelque problème que ce soit au Canada.
Droits des actionnaires
Les droits de vote des actionnaires sont le fondement de la démocratie des sociétés, et un processus de vote des actionnaires transparent, précis, efficace et responsable est fondamental pour la bonne gouvernance des sociétés et le maintien de la confiance à l’égard du marché. Les intervenants et d’autres sont invités à faire des commentaires à savoir si les dispositions de vote des actionnaires prévues dans la LCSA facilitent adéquatement la démocratie des actionnaires.
En 2012, la TSX a émis des règles à l’intention des émetteurs inscrits à cette bourse concernant plusieurs des questions abordées dans le Document de consultation, y compris celles exigeant l’élection individuelle des administrateurs, des élections annuelles pour l’ensemble des administrateurs et la divulgation annuelle à savoir si l’entreprise a adopté une politique de vote majoritaire pour les élections non contestées d’administrateurs ou, dans le cas contraire, si elle a fourni une explication de ses motifs pour ne pas avoir adopté une telle politique.
Avant l’émission de ces règles, l’IAS avait soumis à la TSX des commentaires à l’appui de l’orientation que celle-ci a finalement adoptée [1]. Nous avons par la suite constaté que la TSX avait subséquemment obligé les émetteurs à adopter une politique de vote majoritaire. Nous ne croyons pas que ces enjeux particuliers devraient être abordés, pour l’instant, dans le cadre d’amendements à la législation fédérale.
Nous prenons acte du fait que la TSX-V a également des règles reliées à ces enjeux destinées aux petits émetteurs, mais elles sont proportionnellement moins rigoureuses que celles qui s’appliquent aux plus gros émetteurs inscrits à la TSX. Nous croyons que cette capacité de la bourse de calibrer la réglementation selon la taille et la maturité de l’émetteur permet l’établissement de règles convenant à ses objectifs et qui offrent une plus grande flexibilité, permettant ainsi la croissance et une activité économique accrue. Encore une fois, cela favorise le fait de permettre à la TSX d’édicter convenablement ses propres règles dans ce domaine.
Vote obligatoire par bulletin de vote
L’IAS est d’avis que les dispositions actuelles de la LCSA permettant à tout actionnaire ou fondé de pouvoir d’exiger un vote par bulletin, soit avant ou après tout vote à main levée, sont appropriées et, par conséquent, il ne recommande pas d’amendement à cet égard.
Élection individuelle des administrateurs
L’IAS est en accord avec la règle récente de la TSX exigeant l’élection individuelle des administrateurs de sociétés inscrites en bourse. Nous sommes d’avis qu’un actionnaire ne devrait pas être placé dans la situation gênante d’avoir à voter « pour » certains administrateurs qu’il n’appuie pas ou de renoncer à voter pour aucun des candidats alors qu’en fait, l’actionnaire peut appuyer l’élection de plusieurs ou même de tous les candidats au poste d’administrateur. Nous voyons d’un œil sympathique l’idée que si les actionnaires sont en mesure de choisir les administrateurs de façon individuelle, ils se sentiront plus engagés dans le processus électoral.
Nous reconnaissons également que le vote individuel pour l’élection des administrateurs peut fournir une certaine rétroaction des actionnaires sur les aptitudes d’un administrateur, puisque les actionnaires qui désapprouvent l’élection d’un candidat particulier au poste d’administrateur ou les décisions d’un comité particulier d’administrateurs peuvent faire connaître leur insatisfaction en renonçant à voter pour ce candidat ou les membres de ce comité.
Mandats maximums d’un an et élections annuelles pour les administrateurs
L’IAS favorise des élections annuelles pour les administrateurs de sociétés inscrites en bourse parce qu’ainsi, leur imputabilité à l’endroit des actionnaires est accrue. Nous sommes en accord avec la récente règle de la TSX à cet égard et prenons acte du fait que la vaste majorité des émetteurs tient déjà des élections annuelles.
Cela dit, la LCSA permet déjà aux conseils d’administration renouvelables par tranches et aux compagnies fermées – en particulier pour les petites et moyennes entreprises – de profiter de mandats plus longs, ce qui peut offrir un degré plus élevé de prévisibilité dans leurs phases de croissance.
L’IAS croit que les règles récentes édictées par la TSX répondent aux enjeux d’imputabilité à l’endroit des actionnaires en ce qui concerne les sociétés inscrites en bourse et que les règles actuelles de la LCSA offrent aux compagnies fermées la flexibilité nécessaire pour préserver la stabilité de leurs conseils
Élection des administrateurs par vote majoritaire
L‘IAS est d’avis que les politiques de vote majoritaire représentent une pratique exemplaire et nous appuyons la récente règle de la TSX obligeant les émetteurs inscrits à sa bourse à adopter de telles politiques. Toutefois, nous nous opposons à l’adoption d’une norme d’élection par vote majoritaire.
Le vote majoritaire soulève de véritables préoccupations à l’égard des risques suivants : (i) que le vote résulte en « élections ratées » – c’est-à-dire qu’aucun administrateur n’est élu ou qu’un nombre insuffisant d’administrateurs est élu avec les attributs nécessaires pour répondre à des obligations statutaires de résidence ou aux exigences d’avoir un comité d’audit composé d’au moins trois administrateurs indépendants – ou (ii) que le vote résulte en la perte d’administrateurs ayant des compétences particulières que le conseil estime nécessaires ou souhaitables.
Si une entreprise adopte une politique de vote majoritaire, le conseil dispose alors de la flexibilité nécessaire pour gérer les conséquences d’une élection ratée dans les meilleurs intérêts de la société en tenant compte de l’imputabilité du conseil à l’endroit des actionnaires. À l’inverse, une norme d’élection à la majorité retire au conseil cet élément de flexibilité et peut produire des élections ratées sans le recours à un processus ou à une procédure appropriés pour en assumer les conséquences.
L’IAS croit que les politiques de vote à la majorité fournissent aux sociétés une façon d’exercer la démocratie des actionnaires sans perturber l’exploitation et/ou la gouvernance de l’entreprise.
À la lumière de la récente règle de la TSX rendant obligatoires les politiques de vote majoritaire, nous ne croyons pas qu’un amendement à la LCSA est requis.
Exercice excessif des droits de vote et vote vide
Comme nous l’avons souligné dans notre lettre de commentaires à la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (« CVMO ») en réponse à l’Avis du personnel de la CVMO 54-701, si l’évolution continue des pratiques exemplaires en matière de gouvernance devait accorder une place accrue au vote des actionnaires, ce qui pourrait susciter une augmentation de l’incidence des litiges lors des assemblées, alors l’intégrité du système de vote par procuration devrait être analysée avant qu’une pression additionnelle s’exerce sur elle.[2]
L’IAS est d’avis que les autorités réglementaires provinciales sont mieux placées pour travailler avec les participants au système pour clarifier les règles dans le cadre du système de vote par procuration. Cela dit, notre commentaire général est que le système de vote des actionnaires au Canada doit maintenir son intégrité et qu’en principe, chaque votant devrait avoir un intérêt économique dans les activités de l’émetteur. En ce sens, Industrie Canada pourrait avoir un rôle à jouer pour travailler en collaboration avec les autorités provinciales des valeurs mobilières afin d’évaluer plus avant la transparence et l’efficacité du système de vote des actionnaires au Canada.
En outre, au moment même où l’IAS appuie une transparence accrue de la part des émetteurs, nous croyons important que les actionnaires soient aussi obligés d’agir de façon transparente. Pour dire les choses simplement, une entreprise devrait être en mesure d’obtenir un arrangement de la part de ceux qui en ont le contrôle effectif. L’IAS appuierait des initiatives des autorités réglementaires et des législateurs qui amélioreraient la transparence et l’intégrité de l’infrastructure du vote par procuration.
Comme l’IAS le soulignait dans sa présentation aux Autorités canadiennes en valeurs mobilières (« ACVM ») en réponse au Document de consultation des ACVM 54-401 – Examen de l’infrastructure du vote par procuration, nous reconnaissons que le système actuel est complexe et qu’il faudra du temps pour élaborer des solutions efficaces et fiables, mais le Canada exige un système de vote par procuration offrant des résultats dans lesquels tous les intervenants ont confiance.[3]
Communications entre les actionnaires et le conseil d’administration
La capacité des actionnaires de communiquer efficacement avec la direction de l’entreprise et les autres actionnaires est essentielle pour maintenir la confiance des investisseurs et faciliter une bonne gouvernance d’entreprise. On invite les intervenants et les autres parties intéressées à formuler des commentaires afin de déterminer si les dispositions de la LCSA pourraient renforcer davantage la communication entre les actionnaires et la direction de l’entreprise, et entre les actionnaires euxmêmes, et si elles s’harmonisent avec les progrès technologiques.
Téléréunions pour les entreprises publiques
L’IAS croit que l’utilisation des technologies électroniques dans les réunions d’actionnaires, y compris les assemblées générales annuelles, peut accroître la responsabilisation de l’émetteur comme des actionnaires, mais il y a encore place pour une communication franche et directe que les rencontres « uniquement électroniques » ne peuvent offrir.
En général, nous croyons que chaque entreprise devrait continuer de pouvoir choisir si et comment utiliser les technologies électroniques lors des assemblées d’actionnaires.
Facilitation des dispositions sur « l’avis et l’accès » en vertu de la LCSA
« L’avis et l’accès » permettent aux émetteurs assujettis de réaliser des économies dans la distribution de documents de procuration aux actionnaires en affichant ces documents sur un site Web autre que SEDAR. L’IAS note que les ACVM ont déjà adopté « l’avis et l’accès » au Canada dans leur Règlement 54-101 sur la communication avec les propriétaires véritables des titres d’un émetteur assujetti et dans leur Règlement 51-102 sur les obligations d’information continue. Pour favoriser de plus grandes économies dans les marchés financiers au Canada, nous appuyons fortement des amendements législatifs à la Loi qui faciliteraient « l’avis et l’accès ».
Accès aux circulaires de sollicitation de procurations par les « actionnaires importants » (actionnariat de plus de 5 %)
L’IAS croit fermement que les actionnaires engagés ont un impact positif sur la gouvernance de sociétés. À titre de propriétaires de l’entreprise, il est logique de donner aux actionnaires des points d’accès à sa gouvernance. Toutefois, il faut atteindre un équilibre entre la nécessité de répondre aux préoccupations des actionnaires et celle d’exécuter de façon ordonnée la stratégie d’entreprise, telle que recommandée par la direction et approuvée par le conseil.
Il est important de souligner que la composition d’un conseil d’administration exige du temps, de la réflexion et de l’analyse. L’excellent dossier du Canada en matière de gouvernance de sociétés n’est pas le fruit de la chance ou du hasard. Lorsqu’il cherche à pourvoir à un poste, un conseil doit identifier les compétences et l’expérience dont il pourrait profiter et mener ensuite une recherche de candidats. Le fait d’amender les règles afin d’accroître l’accès aux circulaires de sollicitation de procurations pourrait causer préjudice à l’intégrité des conseils d’administration au pays en affectant ce minutieux processus de sélection.
L’article 137 de la LCSA permet présentement aux actionnaires ayant au moins cinq pour cent d’actionnariat dans une entreprise de mettre en nomination des administrateurs substituts et oblige les émetteurs à publier leurs noms dans la circulaire de sollicitation de procurations. À notre avis, ce système de « proposition » est préférable à un système de « course » qui est antagoniste, trouble le processus de composition du conseil et menace de mener à des luttes de procurations.
Les actionnaires qui ne souhaitent pas ou sont incapables d’influencer la sélection des membres du conseil en empruntant la voie du dialogue ou d’un mécanisme de proposition ont l’option de recourir à une course aux procurations.
Échéance de dépôt de propositions
Aux fins des échéances de dépôt de propositions des actionnaires, l’IAS appuie l’amendement à la LCSA à l’égard de la dernière assemblée annuelle (plutôt que la date d’avis de la dernière assemblée).
Délai raisonnable pour intervenir sur une proposition lors d’une assemblée annuelle
L’IAS est d’avis qu’il est de la responsabilité du président de l’assemblée de déterminer un temps de parole raisonnable pour les participants, lequel variera selon les circonstances, et que la LCSA ne devrait pas être amendée à cet égard. Par exemple, un minimum prévu par la loi pourrait s’avérer inapproprié lorsqu’un seul actionnaire a plusieurs propositions à faire.
Responsabilisation du conseil d’administration
La responsabilisation du conseil d’administration est essentielle pour une bonne gouvernance de l’entreprise. Les administrateurs sont élus par les actionnaires pour gérer et superviser les activités et de la société dans l’intérêt supérieur de celle-ci. Les actionnaires doivent avoir la capacité d’assurer la responsabilisation du conseil d’administration et d’évaluer de façon significative son rendement. On invite les intervenants et les autres parties intéressées à formuler des commentaires afin de déterminer si les dispositions de la LCSA équilibrent adéquatement les rôles respectifs du conseil d’administration et des actionnaires, et permettent aux actionnaires d’exiger des niveaux de responsabilité appropriés du conseil d’administration.
Rôles du président-directeur général et du président du conseil d’administration
L’IAS croit fermement que la séparation des rôles de président-directeur général et de président du conseil d’administration est une pratique exemplaire et nous notons que la majorité des émetteurs canadiens l’ont déjà adoptée. Nous sommes cependant d’avis que les entreprises inscrites en bourse devraient bénéficier d’une certaine flexibilité à cet égard. En ce sens, nous appuyons le modèle « se conformer ou s’expliquer » pour les sociétés inscrites en bourse. L’IAS estime que les entreprises fermées devraient aussi bénéficier d’un certain degré de flexibilité à cet égard.
Approbation des acquisitions considérablement dilutives par les actionnaires
Nous notons que les entreprises inscrites à la TSX doivent obtenir l’approbation des actionnaires pour les acquisitions qui susciteraient une dilution de plus de 25 pour cent des intérêts des actionnaires existants. L’IAS croit que tout amendement à la LCSA à cet égard représenterait un dédoublement et qu’une formulation dans deux documents différents sous deux niveaux de compétence différents pourrait entraîner de la confusion.
Les entreprises fermées mènent également leurs activités en vertu d’un mécanisme approprié selon lequel les droits de vote et de veto des actionnaires peuvent être complétés par voie de négociation et formulés dans des ententes d’actionnaires.
Recours par les actionnaires en cas d’abus
L’IAS estime que le recours en cas d’abus actuellement prévu dans la LCSA offre aux parties prenantes un accès significatif à un processus équitable par voie judiciaire. Nous notons également que la médiation judiciaire dans le contexte d’un recours en cas d’abus est déjà requise en Ontario et répandue au Québec et que la médiation dans d’autres juridictions, notamment en Alberta, est aussi répandue. Pour cette raison, nous ne favorisons pas d’alternative au processus judiciaire et nous notons qu’un avantage fortuit, mais important, du recours en cas d’abus déjà prévu dans la loi est qu’il contribue à l’émergence de précédents judiciaires et améliore l’expérience et l’expertise judiciaire dans les questions commerciales.
Divulgation de la compréhension des questions sociales et environnementales relatives aux activités de l’entreprise
À titre de membre du Global Network of Director Institutes (« GNDI »), l’IAS a publié un énoncé de politique sur les rapports intégrés dans lequel nous appuyions une information financière qui soit basée sur les principes et permette aux entreprises et à leurs conseils de communiquer efficacement avec leurs actionnaires sur les enjeux importants.[4]
Un certain nombre de sociétés canadiennes ont adopté sur une base volontaire des programmes importants sur la responsabilité sociale d’entreprise. De plus, nous notons que les ACVM ont déjà publié des lignes directrices sur les exigences de divulgation reliées aux questions environnementales dans l’Avis 51-333 du personnel des ACVM – Indications en matière d’information environnementale, lequel fournit aux émetteurs des indications sur les exigences de divulgation continue concernant les questions environnementales, et les sociétés inscrites en bourse sont requises de divulguer leurs politiques sociales et environnementales dans leurs notices annuelles, approuvées par leurs conseils d’administration.
Nous ne favorisons pas une réglementation de la LCSA à cet égard et ne croyons pas qu’elle soit nécessaire.
Transferts de valeurs mobilières et autres questions touchant la gouvernance de l’entreprise
Des soumissions sont sollicitées au sujet de la pertinence à long terme des dispositions de la LCSA concernant le transfert de valeurs mobilières et les transactions d’initiés, compte tenu des compétences réglementaires chevauchantes relatives à la LCSA et aux lois provinciales connexes. Des commentaires sont aussi demandés pour ce qui est de l’application des dispositions de la LCSA liées au statut de résidence des administrateurs, aux actes de fiducie et à la responsabilité proportionnelle.
Dispositions de la LCSA relatives aux transactions d’initiés
L’IAS croit que les lois provinciales sur les valeurs mobilières répondent adéquatement aux préoccupations relatives aux transactions d’initiés pour les sociétés cotées en bourse. Dans la mesure nécessaire, on pourrait envisager de conserver dans la LCSA les règles sur les transactions d’initiés pour les sociétés fermées.
Obligations de résidence au Canada pour les administrateurs en vertu de la LCSA
L’IAS est d’avis que les dispositions actuelles de la LCSA exigeant qu’au moins 25 pour cent des administrateurs d’une société résident au Canada sont appropriées et ne devraient pas être modifiées.
Structure de constitution en société pour les entreprises socialement responsables
Des soumissions sont sollicitées au sujet de l’utilité des ESR dans le contexte canadien et de la mesure dans laquelle les dispositions actuelles de la LCSA sur la constitution et les structures facilitent la création d’ESR.
Constitution d’entreprises hybrides conformément à la LCSA
À la lumière de l’arrêt BCE, nous nous interrogeons sur la nécessité d’établir un nouveau régime à l’égard des ESR. Nous croyons que l’arrêt BCE a jugé que les sociétés à but lucratif peuvent être socialement responsables et le Canada peut compter sur de robustes organisations à but non lucratif. À cet égard, nous renvoyons le ministère à un document de 2012 écrit par Mme Carol Liao, préparé pour le compte de la Fondation canadienne de recherche sur la gouvernance, une filiale en propriété exclusive de l’IAS.[5]
Transparence des sociétés
Les intervenants et les autres sont invités à faire des observations quant à savoir si, et comment, la disponibilité d’informations sur la propriété effective aux autorités compétentes, l’existence d’actions au porteur, et la divulgation des renseignements par les prête-noms de l’information sur les personnes qu’ils représentent devraient et pourraient être abordées dans la LCSA.
L’IAS est d’avis qu’il s’agit là de questions qui devraient relever de lois spécialisées ou du droit criminel et ne devraient pas être abordées dans la LCSA.
Cadre de gouvernance organisationnel et lutte contre la corruption
Les intervenants et autres parties sont invités à formuler des commentaires à l’égard de la pertinence des dispositions de la LCSA actuelles sur la tenue de livres, les normes comptables et les vérifications visant à lutter contre la corruption dans les transactions commerciales internationales.
L’IAS note que les dispositions de la Loi sur la corruption d’agents publics étrangers abordent les questions de corruption avec l’étranger et croit que pour éviter la confusion, la LCSA ne devrait pas être amendée à cet égard. Si la nécessité survenait d’une autre législation dans ce domaine, elle devrait faire l’objet d’une loi spécialisée et non d’amendements à la LCSA.
Diversité au sein des conseils d’administration et de la direction
Les intervenants et autres parties sont invités à formuler des commentaires sur la question de savoir si les nouvelles mesures visant à promouvoir la diversité au sein de la direction devraient être incluses dans la LCSA, et ce que pourrait entraîner l’adoption de telles mesures.
Nous notons que les ACVM ont récemment proposé des règles qui instaureraient un modèle « se conformer ou s’expliquer ». Auparavant, l’IAS avait soumis une lettre de commentaires aux ACVM appuyant ce modèle. Nous croyons qu’en ce moment, les ACVM sont les mieux placés pour faire progresser cette initiative.[6]
Responsabilité sociale des entreprises
Les intervenants et autres intéressés sont invités à soumettre des commentaires quant à savoir si les dispositions actuelles de la LCSA font valoir de manière adéquate la RSE, et si des mesures additionnelles pour promouvoir les objectifs liés à la RSE seraient de mise dans la LCSA.
L’IAS est d'avis que les entreprises sont les mieux placées pour déterminer la nature de leurs activités liées à la responsabilité sociale d’entreprise. Dans un récent énoncé de politique du GNDI sur les rapports intégrés, l’IAS a appuyé l’information financière basée sur des principes, mais nous croyons que les entreprises devraient disposer de la flexibilité nécessaire pour adapter leurs programmes de responsabilité sociale d’entreprise à des besoins évolutifs et que le fait d’accroître le fardeau réglementaire à cet égard limiterait cette flexibilité.
Questions techniques et administratives
G. Est-ce que la LCSA devrait reconnaître les véritables propriétaires d’actions en leur accordant davantage des droits octroyés aux propriétaires inscrits? L’IAS favorise généralement la désintermédiation et nous favoriserions donc un régime qui permettrait aux entreprises de communiquer plus directement avec les véritables propriétaires d’actions.
I. Est-ce que l’exception liée au plafond dans la LCSA devrait être majorée de manière qu’une personne ait le droit de solliciter des procurations, autrement que par ou au nom de la direction de la société, sans envoyer une circulaire de procuration de dissident, si le nombre total d’actionnaires dont les procurations sont sollicitées est plus élevé que quinze?
Les sociétés canadiennes sont de plus en plus considérées comme des cibles des investisseurs activistes, un récent rapport ayant décrit le Canada comme la « terre promise » des activistes à la recherche de luttes de procuration. [7] Nous croyons que la présente exemption est adéquate, qu’elle permet des communications adéquates et que le plafond devrait être maintenu. Toute augmentation du plafond réduira d’autant la transparence de l’activité dissidente, ce qui pourrait affecter négativement nos sociétés à long terme.
Conclusion
L’IAS est sensible à la volonté du gouvernement fédéral de s’assurer que la LCSA demeure pertinente, mais nous notons que la plupart des enjeux évoqués dans le Document de consultation s’appliquent d’abord aux sociétés inscrites en bourse et ont déjà fait l’objet d’interventions de la part des autorités réglementaires provinciales et des bourses des valeurs mobilières. Nous estimons que tout amendement à la LCSA ne devrait être adopté que s’il ajoute une valeur claire à la gouvernance de sociétés au Canada, évitant le chevauchement avec d’autres réglementations provinciales et permettant aux émetteurs de maintenir leur flexibilité. Nous invitons Industrie Canada à adresser toute question au soussigné et nous vous remercions de nous avoir donné l’occasion de vous faire part de nos commentaires.
[1] https://www.icd.ca/Resource-Centre/Policy-on-Director-Issues/Positions/TSX-Proposed-Amendments-to-Company-Manual-Regardin.aspx
[2] https://www.osc.gov.on.ca/documents/en/Securities-Category5-Comments/com_20110328_54-701_magidsons.pdf
[3] http://www.osc.gov.on.ca/documents/en/Securities-Category5-Comments/com_20131113_54-401_iofcropd-en.pdf
[4]http://www.gndi.org/
[5]http://www.cfgr.ca/docs/reports/CFGR_2013_Final_Report_Liao.pdf
[6]https://www.osc.gov.on.ca/documents/en/Securities-Category5-Comments/com_20130923_58-401_icdeng.pdf
[7] http://www.activistinsight.com/research/Activist%20Insight%20Annual%20Review%202014-final%20web%20pdf.pdf
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